On a fait cours depuis <em>Workrooms</em>, le metavers pro de Facebook

On a fait cours depuis Workrooms, le metavers pro de Facebook

Cher lecteur,

Ceci est un retour d’expérience sur le premier « cours » que l’on a fait depuis Workrooms. Cours est un bien grand mot, puisqu’il s’agissait plus d’une prise en main en situation réelle de l’outil avec les étudiants.

Le Master Innovation de l’ESTHUA

Tu le sais peut-être, ou pas, j’ai l’honneur d’être Maitre de Conférence Associé à l’ESTHUA, la faculté de tourisme de l’Université d’Angers. J’ai principalement en charge de l’enseignement sur le thème du numérique. Cette année, un Master Innovation et Création d’Entreprises Touristiques a été créé. On m’en a proposé la co-direction, étant moi-même un entrepreneur et ayant des démarches innovantes dans mes structures.

Ce master est en alternance, les étudiants sont un peu partout en France. Dès la conception de ce master il était prévu des « vendredis » de cours, mais l’étudiant peut rester sur son lieu d’apprentissage, c’est en distanciel, il n’a pas a revenir à l’Université d’Angers. Ça permet aux étudiants d’avoir toute la France comme lieu d’apprentissage, n’ayant pas à revenir tous les 15 du mois. Il y a aussi des cours en présentiel, évidemment.

Comme le Master porte sur l’innovation, il nous a paru important d’innover aussi dans les modalités pédagogiques. Nous avons décidé d’équiper tous les étudiants d’un casque de réalité virtuelle, le Meta Quest 2. Nous avons donc distribué ces casques mi-janvier (2023). Il a fallu 1h30 pour distribuer 11 casques aux 11 élèves, pour qu’ils créent leur compte Meta, paramètrent le casque (dont synchronisation avec leur smartphone) et fassent leurs premiers pas dans l’environnement. Les casques des étudiants en apprentissage ont été financés par le CFA Pays de la Loire, les autres casques par l’ESTHUA, merci à eux deux.

Remise des casques aux étudiants

Ils avaient alors pour consigne de poursuivre cette découverte en dehors des heures de cours. Ils devaient effectuer les 2 tutoriels d’utilisation: first step et first contact. Enfin ils devaient se créer un avatar et explorer quelques applications.

Premier cours depuis un metavers

Le vendredi 3 février 2023, avait lieu la première session de groupe dans Workrooms. Quelques jours avant, nous leur avons envoyé un tutoriel complet sur comment rejoindre Workrooms, ce qu’il faudrait faire comme exercices, les informations de paramétrage et information en cas d’impossibilité de se connecter. Il est possible de se connecter à Workrooms sans casques Oculus, en mode visio, donc même si un étudiant est en rade, il peut toujours participer. Il est important d’inclure tout le monde.
Ils avaient pour « mission » de tester Workrooms en autonomie, afin de ne pas le découvrir le jour J.

Workrooms est la salle de réunion virtuelle offerte par META. Workrooms est un environnement virtuel, persistant, de travail. Pour y accéder, il faut un casque de réalité virtuelle, l’Oculus. Vous l’avez compris, on peut aussi participer avec un simple ordinateur, en mode visio, mais c’est moins immersif. On peut utiliser Workrooms seul, en mode « J’ai un environnement de travail virtuel, un bureau (pièce) à ma disposition ». Il y a peu d’intérêt, sauf a être en déplacement, j’imagine utiliser Workrooms dans un TGV ou dans une salle d’embarquement pour m’isoler et m’immerger dans mon environnement de travail. Il est possible de synchroniser son ordinateur dans Workrooms pour l’utiliser dans ce monde numérique, son vrai ordinateur, celui posé sur le bureau. Il est donc nécessaire d’utiliser Workrooms assis à un bureau avec son ordinateur devant soi. Le casque est dit autonome, il n’a pas besoin d’un PC pour fonctionner, juste une connexion internet. Mais Workrooms prend tout son sens dans sa capacité à réunir des participants dans une même pièce pour une réunion, groupe de travail et autre. Les participants sont dans la même pièce et peuvent interagir, collaborer, comme dans la vraie vie, c’est bluffant et tant qu’on l’a pas vécu, on ne s’en rend pas compte. Il y a un tableau pour écrire et collaborer, on peut projeter une présentation (ou autre) on peut échanger, discuter et même se « toucher ». Je vous renvoie à cet article explication

Les premiers étudiants arrivent

Nous avons donné rendez-vous à nos étudiants, ils sont 11, dans une salle Workrooms pour 1h20 de cours. Il a fallu créer la salle (personnalisée aux logos de l’ESTHUA), et y inviter les étudiants, exactement comme l’on crée une réunion sur zoom, meet et autres outils.
Workrooms peut accueillir jusqu’à 16 participants en immersion et une cinquantaine en connexion visio.

La session s’est bien déroulée, tous les étudiants, sauf un, ont réussi à se connecter et à participer à l’intégralité du cours. Encore une fois, ce n’était pas vraiment un cours avec donc contenu pédagogique, mais plus une prise ne main de l’outil.

On s’est donc retrouvé à un douzaine de participants, les étudiants, les 2 responsables de promotions et 2 ingénieurs pédagogiques de l’Université d’Angers, pendant 1h20. Chacun était présent sous forme d’avatar. Ma première réflexion est que tout le monde s’est créé un avatar très ressemblant à ce qu’il est dans la vraie vie. Les avatars, bien qu’en mode « cartoon » sont criants de vérité.

Nous avions paramétré une salle comportant 4 tables de 4 personnes. Comme si on allait travailler en sous-groupes. Lorsqu’on est à une table, on entend très bien les 3 autres personnes à la même table et on entend au loin les autres tables, comme dans une vraie salle. Le prof, à la chaire, entend parfaitement toutes les tables et peut passer de table en table.

Organisation en « théâtre »

Qu’est ce que l’on y a fait alors ?

Chaque étudiant a été au tableau et a écrit dessus, comme dans un cours. Plusieurs étudiants se sont retrouvés en même temps au tableau pour écrire, en même temps, comme dans une vraie salle de cours.

Chaque étudiant a aussi partagé son écran et diffusé une présentation au tableau, comme s’il faisait une présentation à l’ensemble de sa promotion.

Au grès du cours, les étudiants ont changé de place. Nous avons aussi changé la disposition de la salle, en mode théâtre, table ronde et table « exécutive ».

Une table ronde a été organisée, pendant laquelle chaque étudiant partageait son ressenti et faisait un retour d’expérience de cette prise en main. Comme dans un vrai cours, il fallait lever la main pour prendre la parole, c’est très similaire à la vraie vie (jamais je n’aurais pensé écrire une telle phrase).

Il est à noter que nous étions tous dans la même pièce, avec cette impression d’être tous cote à cote, de travailler ensemble, d’échanger, de parler, de se toucher, alors que nous étions tous dans des endroits différents. Il y avait des étudiants proches de Bordeaux, dans les Vosges, à Dijon, Nantes, en Mayenne, à Angers, etc… c’est bluffant cette capacité à être immergé ensemble alors qu’on est chacun dans un endroit différent.

Ce que je retiens de cette prise en main.

Workrooms encaisse sans broncher une réunion avec une douzaine de participants, pas de bug, pas de latence, tout est fluide, claire. Cela dépend aussi de la qualité de la connexion wifi de chacun.

On est tous bluffés par l’immersion et malgré le caractère « cartoon » des avatars, de l’environnement, on est tous ensemble. Immersion est le maitre mot.

On peut réellement collaborer, travailler, échanger.

Les étudiants ont immédiatement adopté l’outil, l’usage, c’est intuitif, il y avait une bonne ambiance, du moins une vraie ambiance de cours.

Disposition de la salle en tables collaboratives de 4 étudiants

Les limites

Le casque Oculus est « lourd » (500 grammes) et au bout d’1h20, on commence à le sentir. J’ai une « sangle » premium qui me permet plus de confort, mais ce n’est pas le cas des étudiants. Les prochaines générations de casques devraient être plus légères.

Il n’est pas évident de prendre des notes, l’utilisation du clavier (dans la vraie vie, en réalité augmentée), n’est pas aisée, les caméras de l’Oculus étant de piètre qualité, ça aussi ça devrait évoluer avec les prochaines générations.

Le casque a une autonomie de 1h30, donc juste ce qu’il faut pour un cours de 1h20, il faut prévoir un long câble pour le brancher et ne plus avoir de soucis d’autonomie

Le rapport d’étonnement de Célya Bergeron

Qu’en pensent les étudiants ?

J’ai demandé un rapport d’étonnement aux étudiants, je vous en livre une synthèse

– C’est fascinant, on a des vraies sensations (Lucie)
– Les avatars sont très proches de ce que l’on est dans la réalité (Lucie et Marius)
– Convergence entre réel et virtuel, notamment la synchronisation de son ordinateur de bureau dans la salle Workrooms (Lucie)
– La salle, malgré son côté « cartoon » est très réaliste, l’esprit se fait berner… c’est le côté immersif (Lucie)
– il y a une vraie sensation de se retrouver dans la même salle que ses camarades, ça crée une cohésion, une dynamique (Lucie, Lorena)
– c’est beaucoup mieux que Teams pour les cours à distance (Lucie)
– le fait de pouvoir partager un fichier de son ordinateur avec les autres (Adrien et Laura)
– c’est un vrai lieu de collaboration (Adrien, Marius, Laura)
les étudiants peuvent plus facilement prendre la parole qu’en visio, moins « appréhension » de se montrer à la caméra que par avatar (Lisa, Lorena)
la fluidité de l’environnement était étonnante, pas de lag, le serveur a encaissé (Hugo)
Il y a un côté ludique, on vient pour travailler, mais c’est ludique (Hugo et Laura)
– Malgré la distance, on a plus de proximité, même avec les profs et intervenants (Hugo)
C’est bénéfique pour la concentration, on n’est pas perturbé par l’environnement réel, local, contrairement à Teams et même à un cours en présentiel à la fac (Hugo et Laura)
– On peut s’isoler pour travailler, en dehors des rdv dans Workrooms, notion de deepworking (Hugo)
– Des fonctionnalités d’activités ludiques, de sondages, etc. seraient les bienvenues (Hugo)
– c’est très simple et facile d’utilisation (Marius et Laura)
– On peut tout enregistrer, ce qui est bien pour un replay pour les absents (Marius
– Le son, l’audio, est comme dans une vraie salle (Laura)

Débriefing du cours avec Laurence Moisy (co-responsable du Master) et Sandra et Alexis (ingénieurs pédagogiques à l’Université d’Angers)

Tous soulignent les limites suivantes

– casque lourd
– durée de vie de la batterie
– possibilité d’avoir des maux de tête
– compliqué pour un cours magistral, plus pour de la restitution, échange, collaboration
– impossibilité d’utiliser le clavier de son ordinateur et donc de prendre des notes
– nécessite une bonne connexion wifi et internet

Conclusion

Merci d’avoir lu jusqu’ici. Si vous l’avez fait, c’est que ça vous intéresse et je ne peux que vous encourager à explorer ces nouveaux univers. Ça fait un peu gadget de l’extérieur, mais tout le monde est bluffé une fois en immersion. Je suis convaincu que ce n’est pas réservé au monde de l’enseignement, mais pour les réunions, groupe de travail, etc. Cela va probablement remplacer nos « banales » visio dans les prochaines années. C’est comme le GPS dans la voiture, avant de l’avoir, on en rigole, une fois testé, on ne s’en sépare plus.

Notre prochain enjeu est de faire perdurer l’utilisation de Workrooms, de l’utiliser plus souvent dans nos enseignements à distance. Il faudrait idéalement équiper plus d’enseignants de casques et/ou avoir quelques casques en partage à l’Université pour que chacun puisse les utiliser. Mais il y a une barrière de la prise en main et d’adaptation de la manière d’enseigner.

Un autre enjeu est d’aller tester d’autres salles que Workrooms, d’autres environnements de travail et/ou collaboratifs.

Ma prochaine « expérience » avec les étudiants serait d’utiliser l’application Wander pour organiser un tour guidé d’un lieu, monument, musée, site touristique, quelque part dans le monde. Un lieu remarquable. Il y aurait un guide (un étudiant) qui guiderait les autres et donnerait ses explications….. la visite virtuelle (mais avec un monde photoréaliste) par excellence….. à suivre

Pour en savoir plus à propos de ce Master Innovation et Création d’Entreprises Touristiques et les autres formations, visitez le site de l’ESTHUA