Voyages SNCF, AirBnb et l’hôtellerie

Voyages SNCF, AirBnb et l’hôtellerie

L’hôtelier est aujourd’hui pris entre le marteau et l’enclume. Il se fait écraser par le marteau d’un côté et par l’enclume de l’autre. Il ne sait pas comment s’en sortir.

Technologie vs humain

Vous aurez compris que le marteau est la technologie, incarnée par Booking.com et que l’enclume est l’humain, le social, le collaboratif, incarné par AirBnb.

Il est impossible de lutter face à la technologie, celle-là même qui sait injecter les offres dans les comparateurs, dans les plateformes d’avis, sur les mobiles, bref, dans tout le processus de recherche/réservation du client. Les outils et compétences des hôteliers ne leur permettent pas de lutter.

Il leur serait plus facile d’aller chasser sur la terre de l’humain (l’enclume), du service, mais pour l’instant peu sont prêts. Ils sont plutôt occupés à chasser AirBnb qu’à s’en inspirer, qu’à s’en servir. Ce qu’ils n’ont d’ailleurs pas réussi à faire avec les plateformes de réservation, les OTAs. À part du législatif (loi Macron), rien n’a été mis sérieusement en place (qui a dit « FairBooking » ?)

Voyage-sncf et AirBnb

La récente actualité le prouve. Le 14 décembre 2015, Voyage-sncf (vsncf) annonce un partenariat avec AirBnb pour encourager les utilisateurs de train à laisser leur logement à des hôtes pendant leur absence. Vsncf propose aussi, dans la même annonce, de confier les jeunes enfants à des voyageurs lambdas pour les accompagner et le partage de voitures particulières laissées à la gare. On est en plein collaboratif.

Levé de boucliers des organisations professionnelles hôtelières qui crient au scandale et à la concurrence déloyale. Vsncf fait marche arrière et annonce dès lendemain mettre fin à cette expérimentation. On assiste ensuite à une auto-congratulation de la profession. Au fait, je n’ai pas entendu les loueurs de voitures, ni les accompagnateurs professionnels du service « jeune voyageur ».

Capture d’écran de l’offre voyage-sncf

Ceci m’amène 2 questions :

Alors qu’on nous fait croire que le secteur a repris la main sur son destin, que les syndicats sont devenus tout puissant, que l’on a réussi à faire plier vsncf, pourquoi personne ne bat le fer tant qu’il est chaud ? Pourquoi ne pas continuer à mettre la pression et profiter que l’on ait les as en main ?

Pourquoi ne pas demander à vsncf de retirer les affiliations Expedia/Booking.com ? C’est tout aussi immoral que AirBnb, c’est même carrément pas éthique ni vertueux ! Mais bon, les hôteliers ont besoin des OTAs. On pourrait y mettre à la place une plateforme collaborative de réservation, un truc à la FairBooking (tiens, les revoilà eux). Bon, ok, ce n’est pas encore au point, notamment car aucun hôtelier ne joue le jeu avec FairBooking, mais ça pourrait être un accélérateur. Mais cela ne marcherait (et encore) que sur le marché Français. En tout cas le client final n’y perdrait pas (trop) et vsncf non plus. Les hôteliers sont prêts à payer une commission éthique de 8 à 10%.

Ma seconde question est inspirée par ce que vsncf apporte : la production de service par le voyageur pour le voyageur dans le but de gagner un peu. Pourquoi les hôteliers ne s’engouffrent pas dans cette voie ? Pourquoi le client de la chambre 124 ne pourrait pas garder les enfants de la 231 ? Pourquoi le jeune de la chambre 352 ne pourrait pas laver la voiture du commercial de la 214 ? Moi, Thomas, je suis prêt à payer un quelque chose pour qu’on me lave ma voiture sur le parking de l’hôtel et je suis aussi prêt à gagner mon « dîner » en arrangeant quelques problèmes informatiques sur le PC portable de Mme Michu de la chambre 143 (et plus si affinité ; )

Les hôteliers auront du mal à lutter sur le terrain de la technologie et de la visibilité, le marteau. Il leur reste l’enclume et ce qu’ils savent faire : l’accueil, le service et la connaissance du territoire.

Il va falloir évoluer, rapidement !

Le métier d’hôtelier et le produit « unité d’hébergement » doivent aussi évoluer rapidement.

La solution est sûrement autour du triptyque : accueil + service + ambassadeur du territoire

C’est d’ailleurs une des thématique que je vais aborder lors d’une table ronde au prochain salon Voyage en Multimédia à Saint-Raphaël, les 4 et 5 février prochain.
C’est aussi un atelier que j’animerai à la journée « L’armor est dans le web » à Saint Brieuc le 29 février prochain => www.larmorestdansleweb.com

Je vous propose de passer en revue ces mutations dans un prochain article.

Cet article est un complément (et non une réponse) aux excellentes productions de Mathieu Bruc et François Houste

Thomas Yung